Le communautaire ressort ses pancartes

Le communautaire ressort ses pancartes

Un changement de gouvernement, surtout après des années d’austérité, est souvent accueilli avec beaucoup d’espoir dans le mouvement communautaire. On a cette habitude de «laisser la chance au coureur». Cette période de recul permet également de dresser le bilan de nos campagnes, de planifier la suite et de s’acclimater aux pratiques du nouveau gouvernement.  Qu’en est-il du mouvement communautaire après un an de gouvernement caquiste?

Le communautaire toujours au prise avec un grave sous-financement

Après 4 ans de la campagne Engagez-vous pour le communautaire et malgré des gains indéniables, force est d’admettre que le sous-financement perdure dans le communautaire. En effet, selon les récentes évaluations, il manque toujours 460 M$ pour financer adéquatement les quelques 4000 groupes d’action communautaire autonome du Québec. C’est dire que les nouvelles sommes investies durant la campagne Engagez-vous n’ont servi qu’à maintenir le bateau à flot. La réalité frappe à la porte, malgré les belles paroles, malgré les sommes qu’on étale sur 5 ans pour leur donner l’apparence d’un plan d’action et malgré certains rattrapages comme ce fut le cas en défense de droit, le communautaire fait encore et toujours figure de services à rabais pour le gouvernement.  Faut-il rappeler que quand les organismes communautaires peinent à joindre les deux bouts, ce sont les couches les plus vulnérables de la population qui en paient le prix. Faire mieux que le précédent gouvernement quand on nage dans les surplus n’a rien de remarquable, surtout quand les sommes réinvesties ne parviennent nullement à briser la logique du sous-financement.

Rappelons qu’Engagez-vous pour le communautaire est une grande campagne nationale de mobilisation qui, depuis 2016, unit les différents secteurs de l’action communautaire autonome de partout au Québec. Elle vise une société plus juste où les droits humains sont pleinement respectés. 

Concrètement, nous réclamons au gouvernement qu’il soutienne adéquatement l’action communautaire autonome (ACA) par l’augmentation de son financement et le respect de son autonomie, tout en réalisant la justice sociale, notamment en réinvestissant massivement dans les services publics et les programmes sociaux. 

Un filet social affaibli

Le bilan des actions du gouvernement en matière de service public est encore moins reluisant. Le gouvernement n’a d’aucune façon remis en cause la réforme Barrette qui a complètement désorganisé les soins de santé et les services sociaux.  Il n’a pas d’ailleurs pas fait mieux pour réduire le temps d’attente dans les urgences. Il n’a pas non plus rétabli l’égalité des chances dans notre système d’éducation dont on parle maintenant comme d’un système à trois vitesses : le privé, les programmes particuliers et le régulier. Plutôt que de s’obstiner dans son projet de maternelle 4 ans, le gouvernement devrait apprendre à écouter les artisan-e-s de nos services publics : professeur-e-s, infirmier-e-s, professionnel-le-s et fonctionnaires. Il est impératif que le gouvernement s’attèle à retisser le filet social. Ses mailles sont rendues si larges que c’est un coup de chance de s’y accrocher si par malheur on tombe malade ou si on perd notre emploi.

On se doit de souligner certains gains fait par les groupes de défense de droit des personnes assistées sociales notamment l’exclusion d’une partie des pensions alimentaires dans le calcul de l’aide sociale et le versement automatique à même le chèque d’une partie du crédit de solidarité. Pour cela, il faut saluer l’écoute du M. Boulet, mais ces petites victoires n’effacent pas que le montant de base de l’aide sociale ne permet pas de combler plus de 51% de ses besoins de bases. Notons que l’on doit remonter à la création du régime, il y a 50 ans pour retrouver un niveau de revenu aussi inéquitable.

Dans un contexte de crise climatique où les personnes souffrant de sexisme, de racisme et de pauvreté seront plus durement touchées par celle-ci, il importe que le gouvernement Legault mette en place des structures pour réaliser la justice sociale et réduire les inégalités. Cela passe notamment par un réinvestissement dans les services publics, dans les programmes sociaux et dans les 4000 organismes d’actions communautaires autonome. M. Legault, vous engagerez-vous pour la justice sociale ou devrons-nous, une fois de plus, ressortir nos pancartes?

Vania Wright Larin,coordonnateur au Regroupement d’éducation populaire en action communautaire de Québec et Chaudière-Appalaches (RÉPAC 03-12)

Nancy Beauseigle, directrice du Regroupement des groupes de femmes de la Capitale nationale (Porneuf-Québec-Charlevoix) (RGF CN)

Karine Verreault, directrice du Regroupement des organismes communautaires de la région 03 (ROC 03)

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